Expo // Zeugma de Gérard Garouste
17/03/2018
Depuis le 13 mars, trois expositions simultanées sont consacrées au peintre figuratif Gérard Garouste. Organisés de concert sous le nom de "Zeugma" - le pont, le lien en grec -, ces événements relient trois lieux parisiens : les Beaux-Arts de Paris autour de Rabelais et de Dante, le musée de la Chasse et de la Nature autour du mythe de Diane et Actéon et enfin la galerie Templon autour du Talmud. A travers une majorité d’œuvres inédites, l'artiste explore les thèmes du passage et de la transmission.
Né à Paris en 1946, Gérard Garouste est l’un des peintres français contemporains les plus importants ; à une époque tournée vers l’art conceptuel, il a fait le choix du figuratif et du classique : « L’originalité était morte avec Picasso ? Bon débarras ! On allait pouvoir s’intéresser au sujet plus qu’au style, raconter des histoires, jouer avec les sens, les émotions, j’en avais tant des émotions. Je voulais renouer avec la peinture, quitte à être jeune et classique, quitte à revenir en arrière. Je ne voulais pas d’une peinture nostalgique, je voulais déjouer l’avant-garde avec mes pinceaux et mes couleurs. »
De son propre aveu, il faut se méfier des œuvres de Garouste, car « l’art doit, de toute façon, tendre des pièges ». A travers le mélange des symboles et les associations d’idées, il nous invite à une double lecture, nous contraint à nous laisser guider par les images tout en convoquant nos souvenirs et nos références culturelles. Les personnages de ses tableaux empruntent les traits de ses proches, mais aussi les siens : tour à tour, il est le héros biblique ou un mystérieux animal. « J’aime l’idée qu’on représente une chose et qu’on en raconte une autre. » Car Garouste ne parle pas que des contes, il parle de sa famille et de ses secrets, de la « manipulation religieuse », des livres « qui ont nettoyé ma tête », du chemin de la connaissance, des tourments des hommes…
Ces œuvres reprennent, mélangent et s’approprient les figures des textes anciens, des contes et des mythes populaires. Le peintre convie également les héros bibliques et ceux des contes ashkénazes. Avec ses personnages aux corps disproportionnés, ses visages menaçants et ses décors imaginaires, Garouste nous plonge dans un univers onirique, à mi-chemin entre le rêve et le cauchemar, le grotesque et le registre poétique.
Au milieu des figures étranges, des visages rieurs et des scènes cruelles, quelques visions apaisées et poétiques tranquillisent le visiteur. Une détresse associée à une énergie salvatrice semble habiter les toiles et les sculptures. Bien après la visite, nous sommes hantés par les mains gigantesques, à la fois menaçantes et rassurantes : « Moi si je peins parfois de très grandes mains, pleines de doigts, c’est un hommage que je leur rends. Tant qu’il y aura des mains, il y aura des dessins d’enfants et des tableaux. »
Céline
NB : toutes les citations de l’artiste sont issues de son ouvrage autobiographique L’intranquille, aux éditions Iconoclaste (2009).
Zeugma, Diane et Actéon, musée de la Chasse et de la Nature, Paris 3e, jusqu’au 1er juillet
Zeugma, le grand œuvre drolatique, Beaux-Arts de Paris, Paris 6e, jusqu’au 15 avril
Zeugma, galerie Templon, Paris 6e, jusqu’au 12 mai
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