Performance // Si par hasard un oiseau / Solo(s)

Si par hasard un oiseau / Solo(s)…, pour un chant partagé qui tisse une rencontre, une intuition : et si nous étions les filles d’Antigone ? Une performance mêlant danse, poésie, musique et vidéo de Delphine Augereau autour du mythe d'Antigone, figure de résistance, de désobéissance, une colère face au pouvoir politique et ses injustices.

Ce n’est pas comme d’habitude, le public enlève ses chaussures à l’entrée & se place à droite & à gauche, en colonne sur des tapis, sous des couvertures ou des plaids si le froid n’est pas resté au dehors. La scène se trouve au milieu des colonnes humaines. Colonnes allongées, ou en tailleur, aux orteils frétillants. Des bougies brûlent devant un écran sur lequel défile un paysage désertique. Dans ce paysage de pierre & de ciels, Henry Bauchau, Anouilh, Sophocle & d’autres fulgurances textuelles autour de la figure d’Antigone.

 

Tout commence avec le repos du public, la respiration commune du grand nombre donne le point de départ. Dans ce souffle, comme une ombre qui prendrait consistance à mesure de ses pas, la comédienne Lara Bruhl apparaît, elle déroule, au milieu du souffle/vent, un tapis de lettres hébraïques & s’agenouille dos à l’écran. Elle sort des aiguilles & brode dans l’inachevé du chemin. Elle raconte, « Quand la première personne mourut…

 

Puis de verbe las, elle se lève & tisse & détisse avec son long corps vêtu de deuil. Est-là le corps d’une femme ou des lettres qui dansent entre elles ? Difficile à dire.

 

Pour l’indicible, derrière son cordophone, sa basse électrique, son cymballum, il y a Sophie Agnel. La musique est une comédienne à part entière, compagne de ce qui ne peut se dire, elle va là où les mots se taisent…

 

En écho au corps/lettres dansantes, la voix de la metteuse en scène Delphine Augereau, aède des temps modernes, à travers elle, la colère d’Antigone. Dans sa voix, le silence en colère prend la parole & ça souffle sur le chemin du milieu, entre la vie & la mort. Quand la mère d’Antigone défie son ombre & danse un tango avec elle, ombre incrustée dans l’écran, le souffle du public se retient.

 

Enveloppé de la vidéo de Valérie Kempeneers, on se laisse gagner par le doux extrême de la question clef de cette performance : « et si nous étions les filles d’Antigone ? »

 

Si par hasard un oiseau, est une réflexion poétique sur cette question brûlante : peut on laisser tous ces morts sans sépulture ?
Qu’ils se nomment Polynice, Ahmed, Fatoumata, ou Majdi ?
Peut-on se taire encore ?
Alors que tout se sait ?

Comment dire l’aujourd’hui ?
Si par hasard un oiseau  est une tentative de dire là où le silence souffle trop fort.

 

valérY meYnadier

Décembre 2019

http://www.m-e-l.fr/,ec,1323

 

Si par hasard un oiseau/ Solo(s), danse / poésie / musique / vidéo, une proposition de Delphine Augereau (jeu), Sophie Agnel (musique/cordophone), Lara Bruhl (danse, jeu), Valérie Kempeneers (vidéo), Le Milieu – 56/58 Cours de Vincennes – Paris 12e, reprise le 14 mars à 20h.


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